Contribution Acquittement de Laurent Gbagbo et de Blé Goudé : un virage historique à bien négocier par tous

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abidjantv.net:Gbagbo et Blé Goudé

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Après 10 ans de procès, la CPI vient d’acquitter définitivement Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé des charges de crimes contre l’humanité portées contre eux par la procureure Fatou Ben Souda. Un dénouement qui permet aux mis en cause et à la Côte d’Ivoire tout entière de passer à une autre étape de leur histoire. Aussi, la question qui se pose est de savoir comment tourner cette page sombre de notre histoire commune et aborder la nouvelle.

En premier lieu, la réponse à cette problématique dépend de la lecture que font nos leaders politiques de cet évènement politico-juridique.
Sur cette question, est-ce que Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé verront en ce « blanchiment » une de sorte victoire qui leur offre l’occasion de se positionner en nouveaux conquérants sur l’espace politique ivoirien ? Ou vont-ils plutôt saisir cette opportunité pour se présenter comme de véritables acteurs de la réconciliation, en appelant au pardon et au rassemblement de tous au chevet de la mère partie pour qu’enfin, celle-ci puisse se réconcilier avec elle-même ?
Du côté du pouvoir, cet acquittement sera-t-il vu comme une aubaine pour en donnant un écho favorable localement, en usant des moyens légaux et/ou politiques pour « blanchir » les deux précités des condamnations prononcées par les juridictions nationales contre eux et favoriser leur retour au pays ?
Dans un camp comme dans un autre, l’heure doit être au discernement et à la prééminence des actes de réconciliation. Cela, en réduisant à un silence définitif les chantres de l’affrontement. Le temps n’est plus à la belligérance, mais plutôt à la repentance et au pardon mutuel.
En deuxième lieu, se pose la question de la nature réelle de l’ambition que nourrissent nos différents hommes politiques pour la Côte d’Ivoire. Quel projet portent-ils pour notre pays ? Une chose est indiscutable aujourd’hui. Comme le dit le proverbe, « après avoir traversé le fleuve à la nage, on en sait davantage sur sa température ». Trois décennies après le décès du père-fondateur, les ambitions confrontées de nos trois leaders ont produit le résultat que l’on sait. Allons-nous accepter qu’ils nous fassent revivre cette même traversée tumultueuse ? Ou plutôt ensemble allons-nous accepter de faire enfin le saut qualitatif pour replacer la Côte d’Ivoire sur la voie de la stabilité et de son véritable développement socio-économique ?
Une chose est sûre, même s’il existe une poche de partisans toujours prêts à emboucher les trompettes aux sons laudatifs et thuriféraires, la conscience se fait de plus en jour dans l’esprit des populations. Car, nos crises successives endeuillent et appauvrissent de nombreuses familles pendant que les acteurs politiques, loin d’en souffrir donnent plutôt l’impression aux populations d’en tirer profit. C’est pourquoi, une conscience collective doit gagner tous les esprits et nous engager plutôt dans la guerre de construction et non de destruction de la Côte d’Ivoire.
En troisième lieu, il est temps que se pose à chaque ivoirienne et à chaque ivoirien, à chaque femme et homme politiques ou à toute citoyenne et tout citoyen lambda, la question existentielle du sens qu’on donne de la vie. Quelle finalité accordons-nous à notre action (politique) sur terre ? Même si « la fin justifie les moyens », notre statut de femme ou d’homme (politiques) nous soustrait-il au jugement de l’humanité ? Que retiendra le monde de notre action terrestre ? Il est vraiment temps que s’empare de nous tous, une réelle introspection profonde sur cette question.
En somme, le temps est venu pour la Côte d’Ivoire de casser la chaîne de la violence, de sortir du cycle de la malédiction pour entrer résolument dans un cycle vertueux de paix et de développement, pour le bonheur des générations actuelles et à venir. Nos acteurs politiques vont-ils prendre la pleine mesure de cette opportunité historique ? Une chose est sûre, il n’est plus sûr qu’ils imposent leur agenda au peuple, qui n’aspire qu’à la paix et au mieux-être.

NURUDINE OYEWOLE
Expert en communication
Analyste politique

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