Exclusif : des raisons de mon engagement pour Bouaké aux enjeux de la visite de Macron avec Ouattara (Amadou Koné)

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photo afrikipresse:Ministre des Transports, Amadou Koné

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Bouaké, autrefois ville carrefour et des brassages culturels, ville de paix et poumon de l’économie ivoirienne avec la boucle du cacao (centre du pays), a vu son lustre entaché de sang, de haine et de conflits nés de la rébellion armée du 19 septembre 2002. Défigurée et isolée pendant une décennie de crise, la ville de Bouaké retrouve peu à peu son visage reluisant des années 80, avec l’arrivée au pouvoir le président Alassane Ouattara. Et depuis lors Bouaké est en chantier. Les diverses populations se reparlent.

Amadou Koné en activité avec les forces spéciales de la sécurité routière
Amadou Koné en activité avec les forces spéciales de la sécurité routière

Une situation qui a entre autre pour maître d’ouvrage, Amadou Koné. Ministre des Transports, Amadou Koné est fils et cadre de Bouaké. Il fut également chef de cabinet du secrétaire général des Forces Nouvelles, Guillaume Soro. Dans le cadre de la visite prochaine des présidents ivoirien et français à Bouaké, il dresse le bilan des réalisations, fait le point des autres attentes des populations de Bouaké, et la région du Gbêkê. Entretien exclusif ! .

Monsieur le ministre, comment se porte aujourd’hui Bouaké, votre ville et le Gbêkê, votre région ?

« Jusqu’en 2017 beaucoup d’investisseurs avaient peur de venir à Bouaké. Beaucoup d’investissements qui ont été prévus ont été retardés, à cause de l’instabilité »

Amadou Koné et les femmes de Bouaké préparent l’arrivée de Macron
Amadou Koné et les femmes de Bouaké préparent l’arrivée de Macron

Bouaké aujourd’hui se porte bien. Nous avons connu des moments difficiles, pendant la crise qu’a connue notre pays sur une dizaine d’années. N’oublions pas que Bouaké était le quartier général de la rébellion déclenchée en 2002. Dès lors, la ville n’a pu bénéficier d’investissement réel de 2002 à 2011. Cela a évidemment freiné son développement, et celui de toute la région du Gbêkê, de façon générale. Durant cette période difficile, nous avons eu un programme très long de DDR, (Désarmement Démobilisation, Réinsertion, ndlr), qui a été décidé à Marcoussis en janvier 2003 et qui, dans sa mise en œuvre, devrait débuter 4 mois après, donc en avril 2003.

Nous devrions commencer d’abord par l’élaboration du programme conjoint des opérations ; ensuite, l’élaboration du programme DDR lui-même.

Ce programme était établi sur des phases que sont le recrutement, l’encasernement, et ensuite, le déploiement des forces conjointes pour sécuriser le pays et accroître la fluidité sur les routes ; mais également, pour sécuriser les élections générales dans le cadre d’une force conjointe qui a été mise en place ; et enfin le démantèlement de la zone de confiance.

Tout ceci a fait que nous avons eu un processus long, qui a traîné jusqu’en 2010. Malgré cela, il y a eu malheureusement la crise postélectorale. C’est après cette autre crise, que le Président de la République a pu véritablement mettre en place la nouvelle armée, les Forces Républicaines de la Côte d’Ivoire. Ainsi tout le processus d’organisation et de refonte de l’armée a été relancé à nouveau.

À Bouaké, on se souvient des mutineries et autres remous. Jusqu’en 2017, beaucoup d’investisseurs avaient peur de venir à Bouaké. Beaucoup d’investissements qui avaient été prévus ont été retardés, à cause de l’instabilité. On ne faisait pas une année sans fermer les corridors.

Au vu de cette situation qui n’honore pas notre ville natale, j’ai donc décidé, depuis 2016, de m’investir davantage dans le développement de Bouaké et de la région du Gbêke, avant même mon entrée au gouvernement actuel. Je voulais ainsi contribuer au retour de la stabilité, parce que natif de Bouaké et ayant vécu aussi la crise pendant de longues années.
Avec une bonne connaissance des hommes et du terrain, je me suis donc impliqué, premièrement à aider à stabiliser la ville. Deuxièmement, à recréer de l’espoir au sein des populations. Parce que quand il y a de l’espoir, on peut être patient.

Pour faire cela, il y avait beaucoup de discussions et de négociations à faire. Il fallait que les cadres, à commencer par moi-même, soyons plus présents dans la ville, auprès des populations.

C’est ce qui vous amène quasiment tous les week-ends à Bouaké ?

« Nous avons passé beaucoup de temps à expliquer aux uns et aux autres que si nous voulons qu’il y ait des investissements, si nous voulons que le privé revienne, il faut que nous retrouvions la stabilité »

Effectivement ! Vous savez, c’est très important pour nos populations d’avoir accès aux responsables. Cela les soulage.

Amadou Koné et le Maire Djibo Nicolas reçoivent  Mariatou Koné lors du match de la paix à Bouaké
Amadou Koné et le Maire Djibo Nicolas reçoivent Mariatou Koné lors du match de la paix à Bouaké

La première chose que nous avons faite était d’être présent, de recevoir et écouter tout le monde. Cela a contribué à créer une confiance entre les populations et nous. Depuis 4 ans, je suis à Bouaké presque tous les week-ends. J’y vais pour recevoir les populations, aller dans les quartiers, voir un peu ce qui ne va pas et essayer d’apporter des solutions dans la mesure du possible.

Avec l’appui du chef de gouvernement, le Premier ministre et sous l’autorité du Président de la République, nous avons travaillé avec l’ensemble des filles et fils de la région pour créer la cohésion au sein des cadres politiques, en les amenant à parler d’une seule voix.

Nous avons passé beaucoup de temps à expliquer aux uns et aux autres que si nous voulons qu’il y ait des investissements dans la région, si nous voulons que le privé revienne pour installer des usines et des entreprises, il fallait que nous retrouvions la stabilité.

Qu’en est-il des investissements à Bouaké ?

« Grâce à la confiance retrouvée, Bouaké est aujourd’hui en chantier »

La confiance ayant été recréé, il fallait l’accompagner par un certain nombre d’actions notamment, porter les préoccupations des populations. C’est ce que nous faisons, en tant que cadres. Et nous le faisons ensemble. C’est ce qui nous a permis de faire le reprofilage des routes des villages. Nous avons mis quasiment une année, l’année dernière (2018, ndlr), pour cela. Et en cette même année dernière, nous avons bénéficié d’engins offerts par le gouvernement. Cela a permis de reprofiler plus de 70 kilomètres de routes dans la ville. Le Premier Ministre qui est à l’écoute des préoccupations que nous lui portons, a construit des écoles dans la ville de Bouaké, notamment dans les nouveaux quartiers.

Amadou Koné lance les colombes pour la paix à la  journée de la paix à Bouaké
Amadou Koné lance les colombes pour la paix à la journée de la paix à Bouaké

Le Président de la République, dans le cadre d’un programme que nous avons avec l’Union Européenne, a accordé 13 milliards de francs CFA pour l’extension des réseaux électriques dans les quartiers nouvellement créés et qui depuis n’ont pas connu d’extension électrique.

Le gouvernement a pris à bras le corps la question de l’eau. Vous avez vu la crise que nous avons connue ici. C’est parce qu’il y a cette confiance, sinon cette crise aurait existé quelques années en arrière que les populations se seraient soulevées.

A Bouaké nous avons aussi quelques unités industrielles, notamment dans le secteur de la noix de cajou, qui sont en train d’être relancées. Nous avons ici à Bouaké la plus grande usine de transformation de noix de cajou en Afrique de l’Ouest. Elle se trouve sur la route de M’Bahiakro et emploie plus de 800 personnes. Il est important de le signaler, même si nous savons aussi que nos populations attendent impatiemment la réouverture de l’usine de Gonfreville.

Les investissements continuent au niveau de l’État. Les stades sont en réfection. Nous avons commencé à réparer les routes dégradées. Nous avons un programme routier de plus de 40 kilomètres de bitume dans la ville qui a démarré.

Moi-même et un certain nombre de collègues, avons décidé de désenclaver des quartiers en faisant des ponts les reliant..

À côté de tout cela, il faut occuper les jeunes, afin qu’ils n’aient pas le sentiment d’avoir été abandonnés.

Depuis trois ans, pendant les différentes fêtes de fin d’année, nous faisons des concerts que les gens n’ont jamais vécus ici, avec les feux d’artifices comme à Abidjan.

La ville est constamment animée du point de vue culturel. C’est l’ensemble de ces actions qui à mon avis, aujourd’hui fait que la ville a repris un nouvel élan.

Il y’a des investissements importants qui arrivent. Nous avons commencé les travaux des routes. Le marché pour lequel le président Macron vient à Bouaké, faisait partie des préoccupations importantes des populations.

Le président Alassane Ouattara a promis que les travaux de ce marché vont commencer avant 2020 et aujourd’hui nous lançons ce chantier qui, d’après ce qu’on nous dit, sera le plus grand marché d’Afrique francophone sur une superficie d’environ 8 hectares.

Nous continuons de travailler avec le gouvernement, le président de la République pour que les industriels reviennent. Parce qu’il faut dire que la confiance est vraiment revenue au sein des populations.

Peut-on dire que la stabilité est aussi de retour à Bouaké ?

Amadou Koné et  ministres  Sidi Touré et Jean Claude Kouassi  lors de l’installation du coordinateur RHDP à Bouaké dans le Gbêkê
Amadou Koné et ministres Sidi Touré et Jean Claude Kouassi lors de l’installation du coordinateur RHDP à Bouaké dans le Gbêkê

« Il appartenait aux cadres de Bouaké de travailler pour que la sérénité et la stabilité reviennent »

Nous sommes en paix, c’est vrai, mais il faut que la stabilité demeure. Il ne faut pas que les gens aient peur de Bouaké. Nous sommes heureux de voir que le président vienne à Bouaké avec des chefs d’État des pays étrangers. Tout cela montre que le climat à Bouaké est maintenant propice. Parce que tout le monde peut désormais venir à Bouaké. La Première Dame est venue ici deux fois en moins d’un an, une ville à laquelle elle est très attachée. Nous savons à quel point le président lui-même aime Bouaké et les populations de Bouaké.

Il appartenait donc aux cadres de Bouaké de travailler pour que la sérénité et la stabilité reviennent, en étant présents, en réanimant la ville, en rassurant les populations pour dire qu’on ne les a pas abandonnées. Tout ceci permet aujourd’hui qu’il y ait des investissements massifs.

Ces investissements ont commencé dans la ville. Je crois que globalement pour les populations de Bouaké, l’espoir est permis. Donc aujourd’hui à Bouaké, tout le monde se donne la main pour préserver cette stabilité.
Pour résumer, il fallait stabiliser et ramener la confiance. Et pour cela,il fallait poser un certain nombre d’actions.

Quel est l’état des lieux en ce qui concerne le Rhdp dans le Gbèkê ?

« La ville de Bouaké est devenue aujourd’hui un bastion imprenable du Rhdp »

Après les dernières élections, et avec les ralliements qui ont eu lieu un peu plus tard autour du RHDP, ( le maire aujourd’hui de Botro est du Rhdp, le maire de Béoumi est au Rhdp. Ce sont les mairies qu’on n’avait pas en dehors de la mairie de Bouaké), vous notez l’implication et l’ancrage du parti dans la région.

Amadou Koné et les chefs religieux de Bouaké
Amadou Koné et les chefs religieux de Bouaké

Nous continuons d’avoir des adhésions. Malick Fadiga, vice-président et pilier du Pdci, à Bouaké a rejoint le Rhdp avec quasiment tous les secrétaires de sections de la ville de Bouaké.

La ville de Bouaké est devenue aujourd’hui un bastion imprenable du Rhdp. Toutefois, nous avons un travail que nous continuons de faire dans les autres localités de la région du Gbêkê, et cela se poursuit très bien. Globalement plus de 300 cadres du parti répartis au conseil politique, au bureau politique sont issus de la région du Gbêkê.

Dans les villages, le RHDP est accepté et connu. À ce niveau nous progressons, car en politique c’est la régression qui est négative.

Quel héritage l’Homme politique, Amadou Koné souhaite léguer aux populations de Bouaké ?

« Toute mon action politique consiste à contribuer à l’édification d’une société développée et moderne dans la région qui m’a vu naître »

Effectivement, la finalité d’un homme politique devrait être de laisser un héritage. C’est ce qui permet de perpétuer votre nom, votre passage.

Je travaille de sorte que le jour où je ne suis plus actif, , les populations de Bouaké et du Gbêkê en général, retiennent que quand j’avais les possibilités, j’ai réalisé, et aidé à réaliser, des choses qui vont rester, des choses qui sont restées.

Amadou Koné supervise les travaux de reprofilage des routes à  Bouaké
Amadou Koné supervise les travaux de reprofilage des routes à Bouaké

Ce que nous faisons avec le président de la République,, avec le premier ministre, et avec les autres cadres d’ici, est que nous sommes une génération qui veut porter la relance de cette région.

Nous y sommes très attachés, et sommes soucieuses du bien-être des populations quelles que soient leurs ethnies. Nous faisons en sorte que partout dans les villages, le nom Amadou Koné rime avec le développement. Pour moi c’est cela qui est important !
Mais il est quand même un peu trop tôt de parler d’héritage que je veux laisser. Retenez juste que toute mon action politique dans le Gbêkê consiste à contribuer à l’édification d’une société développée et moderne dans la région qui m’a vu naître.

Par Philippe Kouhon

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