Interview – Législatives 2021- Augustin Thiam, ministre-gouverneur de Yamoussoukro : “Voici les raisons de la défaite du Pdci à Yamoussoukro”

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Dans cet entretien accordé à quatre quotidiens ivoiriens (Soir info, Le Patriote, L’Intelligent d’Abidjan et le Rassemblement), le jeudi 11 mars 2021 à sa résidence du quartier millionnaire de Yamoussoukro, le ministre-gouverneur du district autonome de Yamoussoukro, Augustin Thiam livre les secrets de la victoire de la liste Rhdp dans la commune de la capitale politique, les difficultés que rencontre le district, et son message à la réconciliation aux populations ivoiriennes.

M. le ministre-gouverneur, Augustin Thiam, comment appréciez-vous la victoire de la liste Rhdp à Yamoussoukro, aux législatives 2021 ?

Avant de parler de cette victoire en elle-même, je voudrais féliciter le peuple du District de Yamoussoukro et la Côte d’Ivoire toute entière. Parce que, ce que nous avons vu lors des présidentielles passées, nous entretenait dans une certaine anxiété vis-à-vis de ces élections législatives qui dans l’ensemble se sont bien passées. Il n’y a pas eu d’incident majeur. Je voudrais féliciter le peuple ivoirien qui nous a permis de tenir des élections législatives apaisées. La campagne que moi-même j’ai engagée au niveau du District a permis de voter de façon paisible. Maintenant, concernant la victoire du Rhdp à Yamoussoukro, sans tirer de drap sur moi, ce n’est pas une première. Y a dix ans, dans ces circonstances similaires, j’avais, moi, aussi, remporté avec M. Abdoulaye Traoré, les deux postes de député de la commune. Et nous n’avions pas eu la sous-préfecture, exactement comme cela s’est reproduit, il y a dix ans. Ce n’est pas une première. Cette victoire peut s’expliquer par beaucoup de paramètres. Ce que je peux dire, ce n’est pas la victoire d’un pays. C’est d’abord la victoire des électeurs. Parce que nous avons fait campagne sur ce thème : « Ne votez pas pour un parti, votez pour l’avenir, pour le développement, votez pour l’avenir de vos enfants. » Et apparemment, les électeurs nous ont entendus. Et ils ont voté pour ceux dont ils pensent pour le développement. Nous parlions de notre pion, du développement et je pense que le message est passé cinq sur cinq. C’est mon premier sentiment de cette victoire. Ce n’est pas la victoire du Rhdp en tant que tel. C’est la victoire des Ivoiriens dans leur combat de développement, dans la paix.

Quelles ont été les stratégies adoptées qui ont milité, selon vous à la victoire de ces Ivoiriens?

Aucun général, aussi intelligent soit-il, ne peut gagner tout seul. Vous avez à vos dispositions des soldats. Il vous appartient en tant que chef, de bien identifier les compétences de chacun et d’assigner des tâches à chacun qui correspondent à ses compétences. Et c’est ce que nous avons fait. Le ministre Souleymane Diarrassouba et moi-même, avec la participation aussi du directeur de campagne, et des autres candidats, chacun des membres de l’équipe de campagne, avait une tâche bien spécifique. Et c’est l’association des deux compétences, qui a permis notre victoire. Et nous avons privilégié des contacts des électeurs, parler aux électeurs, aux groupes socioprofessionnels, s’adresser aux jeunes, aux femmes, s’adresser aux chefs de villages, ainsi de suite. Je pense que c’est cette stratégie que nous avons déployée, qui nous a permis de gagner. Nous avons eu des débats d’idées, pas des débats d’hommes. Moi personnellement, je n’ai jamais demandé à quelqu’un de quitter son parti. Souvent, je le disais dans certaines de mon intervention : « Je ne vous demande pas de quitter le Pdci, je vous demande de voter pour le développement. » Regardez ce que nous avons fait jusqu’à présent sans être député. Est-ce réel ou non-réel ? Est-ce bon ou pas bon ? Vous voulez que cela continue ou vous voulez que cela s’arrête ? C’est à vous de décider . Et ils ont décidé. Quand on se réfère au résultat national, la Côte d’Ivoire entière a opté pour le Président de la République, Alassane Ouattara pour la continuité.

Pourriez-vous nous expliquer, M. le ministre-gouverneur, les raisons de l’échec du Pdci à Yamoussoukro qui pensait être maître du terrain ?

Je ne peux parler d’échec. Ils ont perdu à Yamoussoukro. Mais ils ont gagné ailleurs. À Toumodi, Didiévi, Dimbokro, Tiébissou, ils ont gagné. Mais à Yamoussoukro, ils ont perdu. Yamoussoukro peut paraître comme le Jérusalem pour le Pdci. Y a plusieurs facteurs qui peuvent expliquer. D’abord, le faible taux de participation. D’une façon générale, les élections législatives ne mobilisent pas beaucoup. Ensuite, j’ai l’impression que l’électorat traditionnel du Pdci ne s’est pas beaucoup déplacé. Parce que, beaucoup d’entre eux quand on leur parlait, ils n’étaient pas contents de leurs représentants pour des raisons diverses. Ils n’étaient pas contents de leurs députés sortants. Et sans dire qu’ils allaient voter pour tel ou tel, ils ont préféré rester chez eux. C’est une attitude Baoulé. Quand on te met devant un choix, celui tu ne peux et celui que tu ne veux pas, de fois tu choisis de ne rien dire. Nos militants n’ont pas une telle attitude. Ils se sont déplacés massivement pour aller voter. Ce qui leur permet aujourd’hui de dire que nous avons bourré les urnes. Mais bon, il y a des voies de recours légales, ils vont les utiliser et nous verrons bien si ça aboutira.

Le slogan de la liste Rhdp à ces législatives était « Gagner pour Yamoussoukro», après ce scrutin, quelles sont les perspectives d’avenir en termes de développement pour la ville?

La suite vous la connaissez. Le président Ouattara a promis 50 kms de goudron dans Yamoussoukro. Les contrats sont prêts, tout est prêt. Il ne reste que la signature. Dès que les élections finissent, les semaines qui suivent les travaux vont reprendre. Et en plus des 50 kms qui ont été offerts, il y’a 100 kms qui arrivent. Des caniveaux vont être faits. Vous avez vu vous-mêmes, ce qui est en train d’être fait. Multipliez ça par deux. Parce que, ce qui va être fait, c’est deux fois de ce qui a été déjà fait. L’autoroute de contournement va être faite. Les financements ont été trouvés. Ça a été retardé, parce que l’étude d’impact environnemental que nous avions fait, les financiers n’étaient pas contents, ils nous ont dit de reprendre. Incessamment, sous peu les travaux de construction de cette voie vont démarrer. L’autoroute de contournement va démarrer . Il y’a aussi les programmes que le district met au point. L’électrification villageoise, l’hydraulique villageoise améliorée, construction d’écoles. Tout cela va continuer. Donc Yamoussoukro va bouger. Et nous avons trouvé de l’argent au Pays-Bas pour financer la construction d’une usine à Toumbokro, pour nettoyer tous les lacs, débarrasser tous les lacs des leptus qui existent là-dessus. Et avec ces légumes nous allons produire du composte, de l’engrais liquide et de l’électricité. Et une fois que nous allons nettoyer les lacs, nous allons installer des jeunes qui vont produire ça, comme d’autres produisent du maïs. Et ça va alimenter l’usine qui produit de l’électricité. Des projets, il y en a. Il y’a le troisième commissariat de police qui a été construit par le district qui va voir le jour. Il y’a un dispensaire qui va être construit à Dioulabougou, pour lequel nous avons déjà prévu une ambulance. Et dans le prochain programme , nous avons prévu un quatrième commissariat vers l’Inp-Hb , où il n’y a pas de représentation policière à mon goût. Et nous avons sensibilisé les jeunes à s’orienter vers l’antenne régionale de l’emploi jeunes. Parce qu’il y a pleines d’opportunités qu’eux-mêmes ne savent pas. Et ils ne vont pas à la source pour se renseigner.

Dans le sens de l’apaisement et de la réconciliation, en tant ministre- gouverneur, et chef canton des Akouè de Yamoussoukro, avez-vous un appel à l’endroit de vos administrés, surtout les jeunes ?

Je voudrais d’abord commencer à remercier la population pour son comportement au cours de la campagne électorale. La campagne s’est très bien déroulée. Tous les candidats ont pu aller partout faire campagne, en sous-préfecture comme en commune. Il n’y a pas eu d’incidents. Ensuite, le jour du vote-même, il n’y a eu d’incidents majeurs. Il y’a eu de petites frictions, on m’a signalé par rapport à des listings électoraux, qu’on a vite réglé. Ça vraiment, je félicite la population du canton Akouè. Et puis globalement les Akouè aussi. Et je les remercie d’avoir quelque peu réhabilité l’honneur de Yamoussoukro. Parce que, l’image qu’on avait donnée de nous, il y’a quelques mois n’était pas à notre honneur. Nous sommes sur la voie de la réhabilitation de notre image. Je leur demande de continuer dans ce sens. De continuer à pratiquer ce que la culture baoulé nous enseigne tous, la tolérance, l’acceptation de l’autre, de la différence, le dialogue sous l’arbre à palabres, la conciliation et la paix. C’est ce message que je lance à la population du district, et à travers elle à toute la Côte d’Ivoire.

Comparativement à votre collègue d’Abidjan, certains de vos administrés disent que vous ne faites pas assez, en termes de réalisation d’infrastructures et dans l’amélioration du cadre de vie. Que répondez-vous à ce sujet?

Vous savez Abidjan n’est pas Yamoussoukro. Le gouverneur Mambé et moi, nous sommes ministres-gouverneurs, tous les deux. Mais, le gouverneur Mambé a des ressources budgétaires à travers l’aéroport, l’abattoir, les taxis, à travers différentes taxes, qu’il perçoit que le district de Yamoussoukro n’a pas. Et à l’heure actuelle, le gouverneur d’Abidjan à douze(12) fois le budget du gouverneur de Yamoussoukro. Dans un cas, 48 milliards de francs ; dans l’autre cas 3 milliards de francs CFA. Il faut comparer les choses comparables. Quelqu’un qui a 48 mille francs par mois et quelqu’un qui a 3 mille francs CFA par mois, est-ce qu’ils sont comparables ? Si demain, l’État de Côte d’Ivoire décidait d’augmenter les moyens du District de Yamoussoukro, là, peut-être j’accepterais la comparaison. Mais actuellement, les cas des choses actuelles, la comparaison ne peut être à notre désavantage.

En termes de ressources, comment le district fait?

Au niveau du District, nous avons 83% de notre budget qui nous est donné par l’État, et nous avons que 17% de ressources propres. Les taxes forestières et autres, 17%. Donc, quand l’État tousse, nous on meurt. Je n’ai pas les taxes, comme les taxes municipales, sur les taxis, sur les jeux, je n’ai pas tout ça. J’ai le budget que l’État met à ma disposition. Comment ça fonctionne ? Le district écrit un programme triennal, sur trois ans, et il envoie ça à l’État. Et chaque année l’État met à disposition l’argent nécessaire pour réaliser un an de ces trois ans là. Le budget d’investissement du district de Yamoussoukro est de 740 millions de francs CFA. Pour tout le district, c’est 740 millions par an. Donc, on n’est dans une situation financière un peu compliquée. La plupart des réalisations que vous voyez, les bitumes, les routes, tout ça, c’est fait à Abidjan. Le district n’intervient pas. Le financement, tout s’est fait à Abidjan.

Propos recueillis par Harry Diallo

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