Lettre ouverte à Ngouan Mathias : les employés de la Poste de Côte d’Ivoire disent leur misère

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photo DR:siège de la poste de Côte d'Ivoire

Dernère publication

Ci-dessous la lettre ouverte des employés de la poste de Côte d’Ivoire au président du Conseil d’Administration de la poste le 02 décembre 2019 à Abidjan.

Abidjan, le 02 Décembre 2019

Réf NR: 0097 / 2019 / SYNPT / SG
A
Monsieur le PRESIDENT
Du Conseil d’Administration
De la POSTE de COTE D’VOIRE

Objet : Lettre ouverte à Monsieur le PRESIDENT
Du Conseil d’Administration de la Poste de Côte d’Ivoire

Monsieur le Président,

L’Occasion de cette correspondance nous donne l’insigne honneur de partager avec vous, un constat, celui du quotidien des huit cent (800) familles d’ivoiriens qui constituent le personnel de la Poste de Côte d’Ivoire, lequel quotidien rime avec le mot souffrance ; mais aussi engager votre responsabilité en tant que représentant de Monsieur le PRESIDENT de la République de Côte d’Ivoire, et premier responsable du Conseil d’Administration (PCA) de cette structure, ainsi que la responsabilité de l’Etat de Côte d’Ivoire, dans cette situation de misère qui perdure depuis des années à la Poste de Côte d’Ivoire.

Prenant à notre compte, la volonté des membres du Bureau Exécutif National et des responsables des organes dirigeants du SYNAPOSTEL-CI, d’une part, et celle de la quasi-totalité des travailleurs de la Poste de Côte d’Ivoire, d’autres parts, nous vous adressons cette lettre ouverte, pour éviter toute polémique au sujet de cette autre crise qui couve au sein de la Poste, crise dont les origines remontent à plus d’une décennie derrière nous, crise au nom multiples, et dont la résultante n’est autre que la situation de précarité et d’indigence dans laquelle se trouvent être logés les braves travailleuses et travailleurs de la Poste de Côte d’Ivoire.

Il s’agira pour nous, Monsieur le PCA, de :
-vous faire le point de la situation
-vous donner les raisons de notre posture actuelle
-partager avec vous l’urgence de l’action et de l’anticipation
-en appeler à la responsabilité de l’Etat de Côte d’Ivoire sur le dossier de la Poste de Côte d’Ivoire.
Monsieur le PCA, au lendemain de notre élection, en Novembre 2009, à la tête de notre organisation syndicale, le SYNAPOSTEL-CI, nous avons fait du problème des salaires des travailleurs de la Poste de Côte d’Ivoire, notre priorité.
Le code du travail ne dit-il pas que le salaire, engagement contractuel de l’employeur, est un droit acquis au travailleur ? Notre convention collective ainsi que le règlement intérieur de la Poste de Côte d’Ivoire ne disent-ils pas la même chose, et que sa liquidation devrait se faire au plus tard huit (08) jours après la fin de chaque mois travaillé ? Le salaire apparaît comme une priorité pour tout employeur. Est-il besoin de rappeler qu’à la Poste de Côte d’Ivoire, l’Employeur, c’est l’Etat de Côte d’Ivoire, Actionnaire Unique ?
Monsieur le PCA, à votre prise de contact avec le Comité de direction de la Poste de Côte d’Ivoire et les partenaires sociaux de cette entreprise le 17 Mai 2019, prise de contact au cours de laquelle nous avons été désigné pour être le porte parole des travailleuses et des travailleurs de la Poste, nous vous avons soumis trois (03) attentes majeures que nous nous sommes évertués de développer :

1) De la Sécurisation des salaires du personnel jusqu’à décembre 2020

Depuis juillet 2018, les postiers ont renoué avec les fins de mois cauchemardesques et leur corollaire de problèmes infinis. Aujourd’hui 2 Décembre 2019, nous sommes à attendre trois (03) mois de salaire. Monsieur le PCA, les mots pour dépeindre cette situation que vivent ces 800 familles sont : souffrances morale et physique, humiliation, surendettement, bref, perte de dignité ! Celui qui travail reçoit un salaire ; ce salaire ne lui est pas compté comme un don gratuit ; il est dû, car contre partie du travail accompli. Monsieur le PCA, ces trois (03) mois de salaire sont pour nous une exigence de premier ordre. Nous vous demandons d’agir maintenant, en faisant diligence auprès de qui de droit, car passée la huitaine, nous ne répondrons pas des actes qui pourraient advenir de nos mandants. Mieux nous n’accepterons pas de passer les fêtes de fin d’année dans la tristesse. Trop c’est trop ! Les souffrances au travail, par le travail et pour le travail ; les souffrances comme prix du travail, les postiers n’en veulent plus ! Que reste-t-il de la dignité, à un travailleur, qui n’assure pas ses factures (loyer, électricité, eau), l’éducation de ses enfants, la santé de sa famille, qui ne peut se nourrir et se déplacer ? « Celui qui a faim n’est pas un homme libre » a dit le sage !
NON, Monsieur le PCA, il faut que cela s’arrête, car nous savons très bien nous battre et déjà, nos vieux démons ont refait surface qui nous déroulent une foule de stratégies !
Le SYNAPOSTEL-CI est affilié au plan national, à la centrale syndicale UGTCI et au plan international à UNI GLOBAL UNION, organe consultatif de l’ONU, de l’OIT et de l’UPU sur les questions ayant trait au monde du travail.
Pour rappel, au sortir de la grave crise que notre pays a connue, c’est librement et en toute responsabilité que nous avons tous adhérés à la trêve sociale. Mais dès à présent, Monsieur le PCA, pour nous, la trêve sociale est levée.

2) Que l’Etat, Actionnaire Unique, respecte son engagement vis-à-vis de la Poste (PROF)

Monsieur le PCA, la douleur des travailleurs de la Poste, vos collaborateurs, est d’autant plus grande, qu’un Plan de Redressement Opérationnel et Financier (PROF) a été adopté et mis en œuvre, de toute évidence, pour la partie Opérationnelle. A cette autre phase de la transformation de notre entreprise, le personnel a payé encore le plus lourd tribut, en consentant de laisser des années d’activités pour sortir de l’Entreprise parce qu’ils n’avaient pas le choix.
Mais, la partie Financière de ce Plan de Redressement, qui est l’engagement et l’appui de l’Etat de Côte d’Ivoire, Actionnaire Unique, à cette transformation, est jusqu’à ce jour attendu ! Promesse non encore tenue, engagement non encore respecté !
Voici, à l’analyse, la raison profonde du déséquilibre de l’Institution dont vous êtes le Président du Conseil d’Administration. Elle connaît de sérieux problèmes de trésorerie, elle agonise, au grand désintérêt, voudrions nous nous tromper, du PROPRIETAIRE !
Fragilisée, n’importe quel quidam se lève et saisit ses comptes, et pourtant, cette entreprise est en redressement ! La DGI, d’autorité, refuse de payer la facture de la prestation que la Poste lui a fournie. Bref, Monsieur le PCA, on peut avoir la vision, mais si le Financement fait défaut, on vous prendra pour un piètre personnage, un discoureur, un rêveur !
Monsieur le PCA, vous en avez été instruit dès votre prise de contact ; les difficultés de la Poste de Côte d’Ivoire vous ont été partagées et depuis tout ce temps rien ! Quand l’Opérationnel, c’est-à-dire la direction générale, n’arrive plus à faire avancer le navire, c’est à vous d’user de votre carnet d’adresses ! L’appui attendu de vingt milliards (20.000.000.000) FCFA n’est jamais venu, alors que, le même actionnaire aide des entreprises logées à la même enseigne que la Poste à se relancer en leurs octroyant des fonds plus importants que ceux que la Poste de Côte d’Ivoire a sollicités.
Quel est le problème ? Est-ce un problème de gouvernance ? Un audit a été commandité et réalisé à coup de millions, mais pour quels résultats ? Est-ce la personne de Monsieur le Directeur Général qui cause problème ? C’est le politique qui l’a nommé à ce poste, que le politique prenne ses responsabilités ! Au-delà, quel que soit le problème, il faut d’abord et avant tout, mettre fin à la souffrance de ces 800 familles de postiers. L’année 2019, n’a-t-elle pas été décrétée année du social en Côte d’Ivoire ! Pourquoi donc tant de souffrance ?
On ne crée pas une entreprise pour la laisser mourir ! C’est à l’Etat de Côte d’Ivoire de créer les conditions d’une vraie relance de la poste, et pour en parler, nous ne prendrons qu’un seul exemple, celui du décret N° 2018-270 du 07 mars 2018, désignant la Poste-CI en qualité d’Opérateur du Service Postal Universel (SPU).
A-t-on idée de ce que peut rapporter la Poste, en terme de collecte, de tri, d’acheminement et de distribution des envois postaux n’excédant pas le poids de deux (02) kilogrammes, de (31,5) kg et autres, dans les caisses de l’Etat de Côte d’Ivoire ?
Considérons comme cible, le portefeuille clients des banques du pays, avec une constance de distribution de relevé bancaire chaque mois, selon les dispositions des articles 10 et 43 du règlement N°15/2002/CM/UEMOA relatif au système de paiement dans les états membres de l’union, et de l’annexe de l’instruction N°004-06-2014 relative aux services bancaires à leur clientèle. Prenons une moyenne de 250FCFA/clientX4.000.000 reversés à la Poste. Pensiez vous que la Poste de Côte d’Ivoire ne puisse pas se relever toute seule sans recours à quelque subvention que ce soit de l’Etat ?
Aussi, quelle côte part pour la Poste de Côte d’Ivoire, Opérateur historique, par rapport aux Services Postaux soumis à autorisation délivrée par l’ARTCI après paiement et les Services Postaux libres, soumis à une simple déclaration d’activités ?

3) 27ème Congrès de l’UPU 2020

A ce niveau de notre intervention, nous en appelons à l’autorité de tutelle, à Monsieur le Ministre de l’Economie Numérique et de la Poste, et à son Excellence, MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE, pour que diligence soit faite maintenant pour la Poste et aux travailleurs de la Poste, afin de mettre fin à leurs souffrances, et sauver cet outil de développement, qu’est la Poste de Côte d’Ivoire, symbole d’une émergence réussie ; car, comment peut-on parler de 27ème Congrès de l’UPU en Côte d’Ivoire en Août 2020, alors que l’institution qui incarne l’évènement est agonisante avec des arriérés de salaire impayé de son personnel ?

Monsieur le Président du Conseil d’Administration de la Poste de Côte d’Ivoire, le SYNAPOSTEL-CI vous engage, fondé sur votre honneur, à mettre tout en œuvre, pour que sous huitaine, les arriérés de salaire soient payés, gage d’un climat social de paix.

Pour le Bureau Exécutif National

La Secrétaire Générale Adjointe
Chargée du Secteur de la Poste.

Stéphanie DIAH

Le Secrétaire Général

Arsène AHOKE

Ampliations :

Monsieur le Premier Ministre
Monsieur le Ministre de ENP
Monsieur le SG de l’UGTCI
Madame le SG de UNI GLOBAL UNION

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